14.1.07

Au coin dela rue, la mythologie

Lorsque MJ n'est pas plongé jusqu'au cou dans l'enfer de quelque jungle aussi dense que pleine de périls (ce qui, à vrai dire, est la plupart du temps le cas...), il lui arrive d'avoir à présenter à des étudiants aussi affamés de savoir que des tigres du Bengale peuvent l'être de chair humaine un certain nombre de notions philosophico-métaphysiques quelque peu complexes. Ce qui peut d'ailleurs être parfois, si ça se trouve, aussi dense — et presque aussi périlleux.

J'ai ainsi dû, par exemple, l'automne dernier, tenter d'expliquer le sens de la notion de maya, assez centrale dans la pensée de l'Inde. On la traduit le plus souvent par «illusion». Ce n'est pas faux, mais ça en donne une connotation plutôt péjorative: nul, bien sûr, n'aime généralement se faire à l'idée qu'il se complaît «dans l'illusion».

Maya, en fait, pour la pensée indienne, ce serait d'abord et avant tout le réel en tant qu'il se compte et se mesure. En d'autres termes, c'est le réel vu sous l'angle de sa multiplicité : il y a toi ET moi, nous étions 13 à table et ça porte malheur, elle a gagné 10 millions à la 6-49 et moi j'aimerais bien perdre une demi-douzaine de kilos, il y a eu plus de GIs tués en Irak que de victimes du 9-11, je suis fru parce que j'ai reçu zéro commentaires à mes trois derniers posts, ça fait trois interminables semaines qu'on n'a pas vu le soleil, flûte, le thermomètre est descendu à -150, hier, et est-ce que vous croyez vraiment qu'on peut gagner un référendeum avec 50% + 1 des voix? Enfin, vous voyez, quoi.

Pour l'Inde, maya n'est «illusoire» que si l'on s'entête (par ignorance, le plus souvent) à y voir le «dernier mot» de la réalité. Ou, plus exactement, à ne pas voir que le réel, que l'être est UN au-delà de cette multiplicité, de ce qui se compte et se mesure. Et, pour l'Inde, la sagesse — ou le salut, comme on voudra — consiste précisément à découvrir, «sous» la mutiplicité comptable et mesurable du réel, la réalité plus profonde, plus ultime de son unité. À l'inverse, plus on s'englue dans le comptable et le mesurable, plus on entretient l'illusion — et toute la souffrance qui vient avec.

Je ruminais donc un peu, comme ça, en me demandant comment j'allais bien aborder cette difficile notion, lorsque je suis tombé, sur un mur, à deux pas de chez moi, sur une des plus belles illustrations de maya qu'il m'ait été donné de croiser, et qui illustre vraisemblablement qu'elle constitue l'une des croyances les plus indéracinables de l'Occident:


Nope, it ain't Bombay, Baby!

1 commentaire:

Anonyme a dit...

eh, là, je suis un peu perdu