L'abbé Pierre (1912-2007)
Frappé, dans le Devoir de ce matin (23 janvier 2007), par ce commentaire de l'ancien directeur de la revue Esprit, Paul Thibaud, à propos de cet immense personnage qui vient de mourir:
«L'abbé Pierre était «le meilleur représentant d'un universalisme naïf. Il est un rappel du christianisme tel qu'il est admis dans une société sécularisée, un christianisme idéal pas toujours reconnu dans l'Église et qui repose essentiellement sur la charité.»
Lucide — et même un peu caustique, de la part d'un philosophe de tradition somme toute plutôt chrétienne? (Esprit, fondé par Emmanuel Mounier au début des années trente, fut longtemps l'une des principales voix du «personnalisme». La revue a quand même passablement évolué depuis, tout en conservant son côté gauchiste un peu rebelle quoique plutôt clean...)
Mais peut-être pas tant que ça, quand on y réfléchit. En tout cas, on se prend à penser que le christianisme serait encore plus «admis» dans cette «société sécularisée» s'il se contentait de tenter de... faire du bien, comme le célèbre abbé, plutôt que d'épuiser sa passion à inventer autant de manières névrotiques de — soi-disant — «faire le mal».
Imaginez: l'abbé n'était pas contre l'usage des préservatifs, et il avouait même, à 90 ans passés, avoir déjà eu, dans sa folle jeunesse, les sentiments troublés par... un garçon. 100 contre 1 qu'on lui trouvera encore, comme disait Brassens, «bien d'autres poux dans la tonsure», et qu'il ne sera pas — lui — santosubitoïfié.
«L'abbé Pierre était «le meilleur représentant d'un universalisme naïf. Il est un rappel du christianisme tel qu'il est admis dans une société sécularisée, un christianisme idéal pas toujours reconnu dans l'Église et qui repose essentiellement sur la charité.»
Lucide — et même un peu caustique, de la part d'un philosophe de tradition somme toute plutôt chrétienne? (Esprit, fondé par Emmanuel Mounier au début des années trente, fut longtemps l'une des principales voix du «personnalisme». La revue a quand même passablement évolué depuis, tout en conservant son côté gauchiste un peu rebelle quoique plutôt clean...)
Mais peut-être pas tant que ça, quand on y réfléchit. En tout cas, on se prend à penser que le christianisme serait encore plus «admis» dans cette «société sécularisée» s'il se contentait de tenter de... faire du bien, comme le célèbre abbé, plutôt que d'épuiser sa passion à inventer autant de manières névrotiques de — soi-disant — «faire le mal».
Imaginez: l'abbé n'était pas contre l'usage des préservatifs, et il avouait même, à 90 ans passés, avoir déjà eu, dans sa folle jeunesse, les sentiments troublés par... un garçon. 100 contre 1 qu'on lui trouvera encore, comme disait Brassens, «bien d'autres poux dans la tonsure», et qu'il ne sera pas — lui — santosubitoïfié.
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Anecdote (mais j'vous jure, ça n'a rien à voir avec l'épidémie récente de... tag dans la blogosphère!) : j'ai un peu fréquenté la revue Esprit du temps de mes études parisiennes, alors que Thibaud la dirigeait encore. Apprenant en quoi j'étudiais, il avait eu cette boutade — que j'ai d'ailleurs mise en exergue de ma thèse: «Vous préparez un doctorat d'ethnologie? Ah bon... Et... qui sont vos Indiens?»
3 commentaires:
Bien sûr, si tout les hommes d'Église étaient aussi bons et altruistes que cet homme, la Terre irait bien mieux... Je ne tomberai pas dans les lieux communs de guerres et de tueries religieuses, mais que le prétexte soit Dieu, une impulsion naturelle ou l'ennui, faire le bien autour de soi est tellement une belle chose que ça devrait être obligatoire. Sauf que ça ne serait plus aussi "bien"... Joli sujet! Bonne soirée (de repos!).
Je crois M. Jones que, pouxdanslatonsurifiquement parlant, vous oubliez les égarements récents (et/ou manipulations de son entourage) de feu l'Abbé Pierre lorsqu'il a apporté son soutien à un "ami" révisionniste. Ou lorsque, il y a moins de six mois si ma mémoire est bonne, il a avoué dans son dernier ouvrage avoir commis le péché de chair à plusieurs reprises, déclenchant une véritable "tempête dans un bénitier". Avec une membre de la gent féminine ce coup-ci.
Quoiqu'il en soit, cet homme d'Eglise s'est battu en tant qu'homme pendant plus d'un demi-siècle pour que ses contemporains puissent vivre dignement. Souvent contre sa hiérarchie, mauvaise conscience des responsables politiques qui lui rendent hommage aujourd'hui (il fut à l'époque membre actif d'un réseau de résistance -avant même août 1944, ce qui est une prouesse majeure- et s'est invité l'année dernière à l'assemblée nationale dire à un Monsieur Iznogoud ce qu'il pensait de sa vision du monde)
Bref, c'était un homme exceptionnel qui, je crois, s'est davantage battu pour ses contemporains en tant qu'être humain , gardant pour lui l'immense majorité de son cheminement spirituel.
Excellente boutade de Mr. Thibaud au passage.
Bien d'acord avec vous, VA, quoiqu'il ne soit pas toujours évident de s'entendre sur ce qui est «bien». Peut-être, alors, la manière de le faire compte-t-elle au moins autant que son contenu...
Et dire que seul Zizou avait réussi à lui enlever la première place dans le coeur des Français! Mais c'est vrai, JL, que le brave abbé avait eu de mauvaises fréquentations ces dernières années... Remarquez, j'aurais d'autant plus tendance à ne pas TROP lui en vouloir que j'ai moi-même longtemps beaucoup apprécié la pensée de Garaudy. Jusqu'à ce qu'il se mette à... déraper dans le bon Dieu, justement. Comme quoi la vieillesse est parfois vraiment un naufrage...
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