Au coin de la rue, euh... VI
Les Montréalais le connaissent — quoique peu nombreux sont ceux qui savent son nom — depuis son installation, en février 1972; il y a 35 ans tout rond, donc, ces jours-ci. Les touristes le découvrent avec un sourire un peu étonné, au coin de la rue Saint-Denis et de l'avenue Sherbrooke.
Mais il a changé de coin de rue à quelques reprises; on l'a abîmé, vandalisé, réparé, enduit d'une surface polymérisée pour réduire le risque de nouveaux outrages, repeint, rafraîchi de nouveau...
C'est le Malheureux magnifique,
C'est le Malheureux magnifique,
œuvre monumentale du sculpeur Pierryves Angers, qui écrit à son sujet:
«Par son caractère asexué et ses mains de quatre doigts ni gauche ni droite, cette stylisation de la forme humaine vous appelle silencieusement à une réflexion intime sur la condition humaine et la vôtre en particulier. Concrètement devenu avec les années par sa notoriété un lieu de rendez-vous par excellence, elle vous convie tout en douceur par son attitude de repli protecteur à refaire les liens essentiels qui unissent vos vas et vient (sic) quotidien et le destin fondamental de votre vie et de votre présence sur cette petite parcelle de l'univers.»
Surtout quand l'hiver n'en finit plus de finir...
15 commentaires:
"cette stylisation de la forme humaine vous appelle silencieusement à une réflexion intime sur la condition humaine et la vôtre en particulier"
Elle me rappelle surtout les statues monumentales du Père Lachaise qui commémorent la barbarie nazie, près du mur des Communards. On y retrouve le même accablement, la solitude et le désarroi qu'elles dégagent.
Autant dire que cette oeuvre me met rarement en joie quand nos chemins se croisent !
Nul ne vous reprochera assurément d'être un blogteur... facile et complaisant, JL... Mais ce n'est pas moi qui vous en ferai le reproche! J'aurais même plutôt tendance à vous en être singulièrement reconnaissant...
And... you've got a point, at that, si ça se trouve...
Certes, nous n'avons pas, ici, tout à fait le même background référentiel d'horreurs... Peut-être bien que ça rend les sculpteurs plus... naïfs dans leurs formes...
À vrai dire, j'ai toujours hésité (je ne l'ai pas dit dans le billet lui-même, ç'aurait risqué d'avoir l'air un peu pédant...), par rapport au nom de cette... chose, entre l'oxymore et la contradiction...
À vot' santé pour ce v.s. !!!
J'avoue être un fan de cette étrange sculpture...
On doit lui nettoyer le crâne assez régulièrement... mais là, c'est le genou droit qui mériterait un peu d'attention. :) Ce n'est pas grave... le Malheureux magnifique a relevé sa part d'épreuves, au fil des ans.
merci MW, c'est gentil à vous d'être intervenu, là... Mais je pense que notre cher Jack L. serait heureux que vous nous disiez un peu plus ce qui, dans cette... chose, vous parle autremenrt qu'à... lui, à ce qu'il semble... Merci, en tout cas, par avance!
Si j'aime cette statue, ce n'est pas forcément pour les raisons avancées par son créateur.
Bien vrai qu'elle n'inspire pas une joie débordante... mais j'ai toujours été -- agréablement -- frappé par le contraste entre l'accablement qu'exprime cette sculpture (jack l. l'a évoqué), et l'activité bouillonnante de ce coin montréalais.
Je viens d'apprendre qu'elle est sur son site actuel depuis 1981... je ne l'ai donc connue qu'à l'intersection de St-Denis et de Sherbrooke. Mes pérégrinations de bibliophile m'y amènent régulièrement... je me prépare d'ailleurs à m'y pointer à nouveau, cet après-midi.
La plupart des statues figuratives installées dans des lieux achalandés de Montréal nous montrent des personnages en mouvement, ou qui prennent une pose... arrogante. Qu'elles se réfèrent ou non à des figures connues. Par comparaison, le Malheureux magnifique me fait plutôt penser aux statues d'Henry Moore, même si sa forme est moins abstraite. Je ne sais pas... je trouve cette sculpture très "parlante". Rêve et intériorité...
Merci de vos commentaires, MW. Ils me font réfléchir aussi - et m'inspirent déjà quelques... suites à ce post!
Herr Lehrer, qu'en dites-vous? Et vous, innombrables blogteurs, en ce beau samedi après-midi ensoleillé, oisif et hivernal???
Face au ton souvent péremptoire de mes affirmations, Herr MW a marqué des points !
Je ne prétends pas détenir la vérité, hormis dans le cas de la vraie recette de la pâte à crêpes (mais c'est là un tout autre débat...)
C'est vrai que le contraste entre ce que dégage la statue et son environnement est saisissant, mais là, je crains à mon tour de ne pas avoir de background référentiel suffisamment étoffé pour m'en rendre compte.
Vrai aussi qu'elle dépare un peu des habituelles statues à la gloire militaire/héroïque/passée et/ou purement figuratives (rayer les mentions inutiles) qui encombrent l'espace ailleurs.
Disons qu'elle est parlante, mais que c'est à chacun d'y voir ce qu'elle dit. Et quand on a une vision des choses toujours... optimiste...
En effet, je le connais de vue depuis…toujours, mais je ne connaissais pas son nom.
Le Malheureux magnifique… n'est-ce pas une antinomie ?
Ce n'est pas tant l'intériorité qui me frappe, c'est l'impression qu'il porte sur ses épaules tout le poids du monde, et même de l'univers. Il se protège la tête contre… l'absurde.
Courage Atlas !
Bon, je risque un commentaire futile... De toute façon, tout ce qui est sensé à déjà été dit ici dessus et puis bon, hein, je suis fatiguée. Ainsi, mon frère, un jour, en passant devant l'oeuvre, m'a dit que la statue était sûrement en train de se dire: "Eh merde! J'ai pu de papier de toilette...". J'ai dit futile, quoi! M'enfin, je la rie encore, ce qui fait que chaque fois que je la revoie, l'oeuvre, malgré son côté accablé, m'accroche un sourire au lèvre. Comme quoi, au fond, la vie, hein... Ça sert quand même à s'amuser! ;)
Des cinq ans passés dans la Métropôôle, nombreux sont les endroits visités, mais plus nombreux encore ceux qui ne l'ont pas été. Je n'ai pas eu l'occasion de croiser cette sculpture... de visu, comme ça, elle me rappelle, très intensément, la grande solitude que j'ai vécu dans la Grande Ville. Ce repli sur soi, cette protection par des bras et des mains démesurés, cette position quasi-foetale... Oui. Ça m'parle pas mal. Je la rajoute sur le Post-It qui regroupe tout ce qui me reste encore à voir à Mourial ! :o)
Étonnant, B_O que vous ne soyez jamais passée devant le MM pendant toutes vos années à Montréal. Mais votre lecture en enrichit la signfication, je trouve, et cela me touche.
J'ai bien aimé, aussi, ce rapprochement avec un Atlas de... l'absurde, Madame P. Camus disait qu'il fallait imaginer Sisyphe heureux. Peut-être pourrait-on imaginer Atlas malheureux ET... magnifique?? Mais... croyez-vous vraiment que les deux termes soient à ce point contradictoires, P.?
Merci de votre commentaire, VA, que je n'ai pas du tout trouvé «futile» et qui, au contraire, m'a vraiment fait sourire. J'adore, à vrai dire, ces «détournements de signification» un peu rebelles et iconoclastes. (Combien de posters du penseur de Rodin se retrouvent dans des salles de bain...) Je suis d'ailleurs pas mal sûr que notre ami JL - et bien d'autres blogteurs - risquent de l'apprécier aussi. Le problème, c'est que, moi non plus, je ne pourrai plus jamais passer devant sans penser à votre rouleau vide! :)
Je l'aime beaucoup, le Malheureux Magnifique.
Et c'est vrai que parfois, on se sent un peu seul, au coin de Saint-Denis et Sherbrooke.
Mais dites, Mentana, j'aimerais beaucoup, si jamais ça vous inspire, que vous nous éclairiez éventuellement sur une autre grosse sculpture extérieure (vue cent fois, mais je ne me souviens plus exactement où) qui met en vedette toute une file de personnages qui pointent le doigt vers un même endroit.
Vous voyez ce dont je parle?
Oui, SW, je vois - quoique pas avec une extrême précision, hélas. C'est vers le centre-ville, près de McGill College, m'semble. Mais peut-être l'érudition urbaine de MW nous sera-t-elle utile à cet égard? Ou, alors, l'obervation de blogteurs qui, tel notre cher JL, fréquentent assidûment le downtown??? En tout cas, euh... je vous laisserai volontiers un post là-dessus, ce coup-ci! :)
Ah que j'aime voir ces photos personnelles qui nous montrent comment les gens perçoivent ce qui les entoure. Même un monument, une sculpture, une façade... tout, de la manière dont c'est montré... tout cela parle et parle encore.
Merci à vous. :o)
Mais... vous êtes extrêmement gentil, Fr. Voici un fort sympathique feedback. En effet, on pourrait bien se dire - et Dieu sait qu'il m'arrive souvent de me le dire: mais what the f***... quel est le sens de... refiler des photos, comme ça, qui ne sont même pas...«artistiques», en plus, mais qui sont juste - justement - MON regard... Vous auriez été le seul à réagir à ce post que... eh bien... j'aurais trouvé que ça valait la peine de publier ces photos... Merci!
Publier un commentaire